Modification du Code civil suisse : protection contre les atteintes à la possession d’un immeuble

9 février 2021
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Comme vous l’aurez constaté au fil des dernières éditions, la CGI suit activement les dernières actualités fédérales et comme nous vous l’indiquions dans nos éditions précédentes (Immoscopes n° 143, 150 et 153), la CGI avait collaboré avec le HEV Schweiz pour déposer trois initiatives parlementaires tendant à améliorer le droit du bail.

Dans le cadre d’une consultation fédérale, nous avons pris position sur un projet de modification du Code civil (CC) et du code de procédure civile (CPC) suisses visant à renforcer les moyens de défense des propriétaires contre les squatteurs. Ce projet de révision fait suite à la motion 15.3531 du Conseiller national Olivier Feller qui demandait que le délai dans lequel le possesseur doit agir pour exercer son droit de reprise soit porté à 48 heures ou 72 heures. Il relevait que le droit de reprise prévu à l’article 926 CC ne pouvait pas être exercé dès lors qu’il posait une condition d’immédiateté très difficile à remplir. En effet, le possesseur doit agir « aussitôt », soit dès l’arrivée des squatteurs, et non dès la connaissance de leur arrivée.

Avec la modification proposée par le Conseil fédéral, les conditions de la protection sont assouplies. Le nouvel article 926, alinéa 2, CC prévoit en effet que le possesseur peut, lorsque la chose lui a été enlevée avec violence ou clandestinement, la reprendre « aussitôt après avoir eu connaissance de l’usurpation en ayant fait preuve de la diligence requise », en expulsant l’usurpateur s’il s’agit d’un immeuble. L’actuel article 926, alinéa 2, CC dispose que le possesseur peut la reprendre aussitôt, mais sans préciser le dies a quo. Cette précision est bienvenue et évitera ainsi à celui qui n’avait pas connaissance de cette usurpation d’être déchu de ses droits.

Nous considérons néanmoins qu’il aurait été plus opportun de supprimer le mot « aussitôt », qui restreint encore trop fortement la possibilité d’agir et qui reste une notion indéterminée. Le possesseur devra déjà démontrer qu’il a fait preuve de la diligence requise. S’il devait trop tarder, il aura ainsi manqué de la diligence requise et serait déchu de son droit.

Le projet dispose en outre que les autorités compétentes assurent en temps utile l’intervention requise par les circonstances et prévoit un nouvel outil de procédure, l’ordonnance de portée générale, permettant d’agir contre un cercle indéterminé de personnes. Cette ordonnance a pour but d’éliminer les troubles de la possession qui sont déjà survenus et l’usurpation d’un immeuble lorsqu’elle a déjà été tentée ou est survenue. Nous sommes absolument favorables à l’introduction de ce nouvel outil qui permet au possesseur d’agir sans être obligé de connaître l’identité des usurpateurs/squatteurs, dès lors que, dans les faits, l’identité des squatteurs n’est pas connue.

Le nouvel article 260b CPC dispose toutefois que l’usurpateur touché par l’ordonnance pourra faire opposition dans un délai de 10 jours, sans motiver cette opposition, mais exigeant de divulguer son identité. Cette ordonnance ne rendra plus d’effet envers l’opposant (le squatteur) et le possesseur devra alors agir en justice en introduisant une demande contradictoire à l’encontre de l’usurpateur. Cette procédure pourrait être longue et coûteuse. Il conviendrait à nos yeux de prévoir une procédure simplifiée et rapide pour le possesseur en cas de contestation de l’ordonnance. À défaut, elle risque d’être sans effet.

Nous avons ainsi soutenu ce projet de révision, sous réserve des remarques ci-dessus. Celui-ci va sans nul doute dans le bon sens s’agissant de la protection de la possession et de la garantie de la propriété. La garantie de la propriété étant un droit fondamental, il est impératif que le possesseur puisse expulser facilement les personnes qui occupent illicitement son bâtiment.

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Anne Hiltpold
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