Quel Habitat pour les séniors ?
Trop vaste depuis le départ des enfants, trop éloigné des commerces et des transports publics, trop dangereux en raison des escaliers : un jour, le « home sweet home » dans lequel on a toujours vécu n’est plus adapté. À Genève, il existe plusieurs types d’habitat dédié aux seniors, allant de l’accueil d’un jeune étudiant dans son appartement jusqu’à l’immeuble à l’encadrement pour personnes âgées. Tour d’horizon.
Secrétaire générale de la Plateforme du réseau seniors Genève, Irina Ionita est catégorique : « L’habitat senior ne se résume pas à l’EMS, bien au contraire. A la fin 2021, le nombre de personnes âgées de 65 ans et plus, dont près d’un tiers de plus de 80 ans, était de 84 924. Plus de 80 % des seniors, même très âgés, vivent chez eux. L’EMS ne concerne qu’une minorité puisque seules environ 4000 personnes âgées vivent en EMS. Et elles sont quelque 2000 à avoir intégré un habitat adapté ou protégé. »
Afin de répondre à la volonté des seniors qui veulent rester chez eux, Genève a développé ces dernières années une structure efficace de soins à domicile, notamment pour les personnes très âgées. « En fait, explique Irina Ionita, les soins à domicile ont fortement coloré la politique mise en place pour les seniors, mais nous devons encore évoluer, car les soins à domicile répondent seulement à une partie des besoins des seniors. Aujourd’hui, le problème concerne l’habitat qui n’est pas adapté. Une personne âgée n’a pas forcément besoin de soins ; par contre, elle peut avoir de la difficulté à monter les marches d’escaliers dans le hall de son immeuble ou, si elle est en fauteuil roulant, elle va avoir besoin d’espace pour se déplacer chez elle. »
En 2021, la Plateforme du réseau seniors Genève a ainsi réalisé une brochure sur l’habitat senior afin de mettre en place un référentiel typologique des logements existants aujourd’hui à Genève, qui sont adaptés aux besoins d’une population vieillissante en fonction du degré de dépendance de la personne. Verdict ? Il existe une vraie diversité de l’offre avec l’émergence d’une nouvelle approche de l’habitat plus flexible et souvent plus intergénérationelle, à l’opposé du choix restrictif à domicile contre établissement médico-social.
Les attentes et les besoins des seniors actuels et futurs, de même que l’évolution démographique et l’allongement de la durée de vie, obligent à (re)penser l’habitat afin de permettre à chacun de vivre sa vieillesse à sa manière et selon ses envies, et ce malgré les éventuelles pertes progressives liées à l’âge.
« Rester chez soi est bien sûr ce que tout le monde souhaite et à raison, analyse Irina Ionita, mais il faut aussi être réaliste. S’il n’est pas adapté, le domicile peut vite devenir un piège pour le senior qui risque de trébucher en passant le pas de porte d’une pièce à l’autre ou qui va éviter de sortir de chez lui parce qu’il doit descendre des marches. Le domicile va finir par isoler la personne à un âge où, avec l’éloignement des enfants et la disparition des amis proches, elle voit son univers social se réduire. »
Etudiant et senior, un duo tendance
Dans son choix, le senior doit prendre en compte plusieurs critères réunis autour de trois grands thèmes : les prestations d’infrastructure (aménagements, rénovations, architecture sans obstacle, structures spécialisées, etc.) ; les prestations d’accompagnement social (lutte contre l’isolement social, participation à la vie sociale, activités de loisirs, présence, aide pour les actes de la vie quotidienne, sécurité, mobilisation, etc.) ;les prestations de soins (soins corporels, soins de santé, soins palliatifs, soins de fin de vie, etc.)
A cela s’ajoute un autre critère important qui peut être sous-estimé lorsque la priorité est donnée à une approche purement rationnelle : la personnalité du senior !
Une fois cet état des lieux effectué, plusieurs solutions se présentent, notamment la cohabitation privée, un concept, bien développé en Allemagne notamment, qui est basé sur la cohabitation intergénérationnelle et s’est répandu ces dernières années dans d’autres pays.
Le principe consiste à réunir sous un même toit une personne âgée vivant dans un grand appartement ou une maison et un étudiant ou une étudiante à la recherche d’un logement au loyer abordable. Le senior met ainsi une chambre à la disposition de l’étudiant en échange de sa présence et de petits services tels que faire les courses, s’occuper d’un animal, aider à l’utilisation d’Internet ou jardiner.
« Le senior met ainsi une chambre à la disposition de l’étudiant en échange de sa présence et de petits services. »
En 2016, l’Université de Genève a créé, en partenariat avec Pro Senectute Genève et la Fondation BNP Paribas Suisse, un programme de logement intergénérationnel inspiré du modèle allemand. Baptisé « 1h par m2 – Un étudiant sous mon toit », le programme remporte un vif succès avec, depuis son lancement, la formation d’une centaine de tandems. « C’est un système qui ne coûte rien au senior, précise Irina Ionita. L’étudiant lui verse entre 100 et 120 francs par mois pour les charges. Mais il ne correspond pas à tout le monde, il faut accepter d’avoir quelqu’un sous son toit. »
Faciliter la mobilité
Répondant aux problèmes d’infrastructure, le logement privé aménagé a pour objectif de préserver l’indépendance fonctionnelle de la personne âgée, de faciliter l’aide et l’assistance dont elle a besoin et de favoriser le maintien à domicile.
Concrètement, il s’agit d’apporter des modifications simples à réaliser et peu coûteuses généralement, comme un meilleur éclairage, ou plus importantes telle que l’installation d’un monte-escalier. Pour les propriétaires en propriété par étage (PPE), la PPE doit donner son accord si les aménagements concernent les lieux communs.
Globalement, le parc immobilier genevois ne correspond pas aux besoins d’une population qui va perdre en mobilité et en autonomie. Des aménagements structurels peuvent être effectués dans le cadre de travaux de rénovation.
L’immeuble dit rénové s’adresse à des seniors autonomes dans leur quotidien, mais ayant besoin d’un environnement adapté à leurs besoins et sécurisé. Une fois rénové, l’immeuble offre, par exemple, de larges entrées, des ascenseurs spacieux, des rampes d’accès ou encore des textes en relief qui permettent de créer un environnement facilement accessible pour un senior.
Pour une personne âgée, même en bonne condition physique, le logement représente une succession d’obstacles pouvant entraîner une chute, malgré la parfaite connaissance que l’on a de son chez-soi. La marche plus haute que les autres de deux centimètres que l’on a franchie des milliers de fois à 40 ans devient un piège à 80 ans !
Pour conserver son indépendance, le senior a besoin d’un logement favorisant la mobilité et la sécurité fonctionnelle.
C’est le concept de l’immeuble à encadrement pour personnes âgées (IEPA) qui se compose de logements indépendants destinés aux personnes ayant atteint l’âge de l’AVS et capables de gérer le quotidien, mais qui sont en situation de fragilité accrue.
Chaque habitant est un locataire titulaire d’un bail lui donnant accès à un appartement adapté à ses besoins ainsi qu’à un environnement communautaire et divers services de proximité tels que intendance, premier niveau de secours, permanence nocturne, animation ou encore repas en commun.
Un habitat évolutif
Ces dernières années, une nouvelle approche du logement pour personnes âgées se dessine avec l’habitat évolutif pour seniors (HEPS).
Il s’agit d’anticiper les besoins des seniors au fur et à mesure de l’avancée en âge plutôt que d’y répondre dans l’urgence. Dans cet esprit, la nature et l’ampleur du soutien apporté à la personne âgée évoluent en fonction des changements qui interviennent dans son état de santé, son mode de vie et ses habitudes quotidiennes. Diverses prestations d’aide et de soins sont ainsi proposées, graduellement, selon l’évolution de la situation médico-psycho-sociale de la personne.
La structure met l’accent sur l’indépendance du senior, qui a son appartement, et sur le lien intergénérationnel grâce notamment à des logements pour étudiants et à des espaces communs. Chaque résident est invité à participer à la dynamique de l’HEPS. Pour sa part, l’EMS accueille des personnes âgées souffrant d’une ou plusieurs maladies chroniques et/ou de troubles cognitifs et dont l’état de santé ne permet plus d’effectuer seules, chez elles, les activités du quotidien. Il offre un cadre de vie structuré, sécurisant et convivial tout en respectant l’autodétermination des patients.
Ces dernières années, l’EMS s’ouvre de plus en plus sur le quartier et la cité.
5 conseils pour choisir son habitat
- Anticiper pour ne pas avoir à se décider dans l’urgence
- Choisir un habitat qui correspond à ses habitudes de vie
- Réfléchir aux services dont on souhaite disposer
- Visiter différents types d’habitat
- Se faire conseiller par un professionnel pour l’aspect financier