La commune de Meinier, le charme discret de la campagne
Éloignée du cœur urbain du canton et sans accès direct aux rives du lac, la commune de Meinier a été préservée du boom immobilier désordonné qui a défiguré certaines communes du canton. Sa population a stagné jusque dans les années 60, avant de doubler en dix ans. Depuis, l’accroissement n’est plus que d’une centaine de personnes par décennie. Cet essor raisonné lui a permis de conserver son caractère feutré, même si le cœur du village a été profondément remodelé depuis la création d’un centre intergénérationnel et de petits immeubles.
Avec un territoire de 695 ha, la commune de Meinier se retrouve dans le peloton de tête des 10 plus grandes communes du canton, devant des villes telles que Veyrier, Lancy, Le Grand-Saconnex et Carouge. La densité de sa population (310 habitants au km2) est par contre restée assez modeste. Au XVIIe siècle, l’actuel village de Meinier était formé de deux hameaux distincts : Meini à l’est et La Tour à l’ouest. Ce n’est qu’au XIXe siècle que les deux noyaux commencèrent à se rapprocher en raison du développement de constructions le long de la route de Gy. Des immeubles d’habitation s’érigent au nord alors que ce sont surtout des villas individuelles qui sortent de terre au sud. Cela se traduit aujourd’hui par la présence d’un habitat groupé qui s’articule autour de ces deux pôles.
Le développement urbain n’a par contre eu que peu d’emprise sur la plupart des hameaux que sont Carre-d’Aval, Carre-d’Amont, Corsinge-Les Murailles, Essert de Compois. Les deux premiers sont inscrits à l’inventaire des sites construits à préserver en Suisse. A Corsinge-Les Murailles aussi, l’emprise et la structure du bâti sont presque restées inchangées depuis 1830. Quant au lieu-dit Compois, ce fut une seigneurie et paroisse indépendante qui possédait une église et un château, tous deux disparus vers la fin du Moyen Âge. Comme il comporte aujourd’hui moins de 10 bâtiments, il a perdu son statut de hameau, même si on lui attribue encore parfois ce titre.
Un important pôle artisanal prend de l’essor aux frontières de la commune
Un fort dynamisme caractérise la zone industrielle de La Pallanterie, sur laquelle sont implantées une cinquantaine d’entreprises offrant du travail à près de 900 personnes. Située à cheval sur le territoire de la commune de Meinier et de Collonge-Bellerive, cette zone fait actuellement l’objet d’un plan d’extension d’envergure portant sur un terrain de 54 000 mètres carrés de surface au sol dédié à des activités artisanales et industrielles. Le déplacement du tracé du gazoduc pour des questions de sécurité a déjà été achevé. Les travaux d’aménagement des dessertes et de l’équipement des terrains destinés à l’extension de la zone industrielle devraient pouvoir commencer sur la commune de Meinier avant la fin de l’année 2018. Les promoteurs du projet escomptent que les premiers coups de pioche du chantier de construction des bâtiments seront donnés – si tout va bien – au printemps 2019. Une fois achevés, les bâtiments à vocation artisanale devraient représenter 100 000 mètres carrés de surface de plancher répartis sur trois niveaux et un attique et porter la capacité totale du site de la Pallanterie à quelque 2000 emplois.
« Au XVIIe Siècle, l’actuel village de Meinier était formé de deux hameaux distincts : Meini à l’Est et la Tour à l’ouest. »
Un poumon de verdure au cœur du bourg
Le déplacement vers Rouelbeau des terrains de sport qui se trouvaient jusqu’ici au centre du village a permis d’y ériger une esplanade très aérée dédiée aux rencontres villageoises et à la vie intergénérationnelle. Des bâtiments consacrés aux activités sociales et scolaires, du logement social et un restaurant ont été érigés autour d’un espace vert équipé de jeux pour les enfants et utilisé pour les fêtes du village et le défoulement de toute la population. Quelques commerces émaillent la principale rue qui traverse le village qui se bat pour sauver sa poste.
Sur le reste du territoire de la commune, on trouve de nombreuses anciennes fermes, dont certaines sont partiellement rénovées et ont conservé un charme d’antan, alors que d’autres ont gardé leur aspect ancestral. De vastes surfaces s’étendant sur 80% du territoire de la commune sont toujours dédiées aux cultures maraîchères et des céréales, à la vigne, aux forêts et aux pâturages destinés aux animaux de rente. Le caractère champêtre de la commune est aussi souligné par la présence de deux manèges qui attirent les cavaliers de toute la république.
Au centre du village, on trouve une église catholique qui est mentionnée pour la première fois en 1153 dans une bulle du pape Eugène II, confirmant les possessions du monastère de Saint-Jean-hors-des-Murs, qui dépendait de l’abbaye d’Ainay, située à proximité de Lyon. Avec l’arrivée des troupes bernoises en 1536, elle passe sous la férule de la religion protestante, avant que le village ne repasse au catholicisme au XVIIe s.
Les ruines du château de Rouelbeau, qui vient de faire l’objet de fouilles archéologiques importantes, ont permis de reconstituer l’aspect de cette place forte depuis sa construction en 1318 et ses évolutions successives. On retrouve les traces de ce château symbolisé par une tour sur les armoiries de la commune, à côté d’une étoile à six branches qui font référence à ses six hameaux d’antan, ce qui prouve l’intérêt de ce site, qui a depuis été décrété d’importance nationale. Construit sous sa forme originale en pleine guerre opposant les dauphins de Viennois et sires de Faucigny aux comtes de Savoie, cette place forte protégeait l’accès de ces derniers à leur ville neuve d’Hermance et ainsi aux rives du lac Léman.
Les fortifications de forme rectangulaire étaient constituées de palissades de bois érigées sur un tertre protégé par une double rangée de douves. Des tours carrées, également en bois, défendaient trois des angles du périmètre du quadrilatère. Une petite tour dotée d’un pont-levis protégeait la porte d’entrée de la place forte. Un bâtiment de 42 m de périmètre servait de logis à la garnison. Les palissades en bois furent ensuite renforcées par des murs en maçonnerie dans les années 1350. Durant la Réforme, les seigneuries de Genève, puis de Berne, prirent possession du château, qui revint ensuite au duc de Savoie à partir de 1567.
L’État de Genève s’en appropria en 1798 avant de le céder à des particuliers qui le démantelèrent pour se servir de ses matériaux de construction pour bâtir leurs maisons. Le site fut ensuite laissé à l’abandon et la végétation envahit les lieux. Ce n’est qu’en 2001 que d’importants travaux de fouilles archéologiques et de mise en valeur du site le sauvèrent d’une disparition inéluctable. Elles se sont achevées en 2016. Aujourd’hui, on peut accéder au site et se rendre compte de son intérêt malgré les dégradations dont le château a fait l’objet avant la prise de conscience des autorités pour cet endroit unique en son genre.
La cidrerie de Meinier : la pomme dans tous ses états
C’est en 2005 que Claude Ménétrey s’est lancé un pari peu ordinaire avec deux amis arboriculteurs : créer une cidrerie sur son exploitation agricole du hameau d’Esserts. C’est là que, dans les années 60, son père avait commencé, avec son frère, à planter des pommiers pour diversifier son activité. La décision prise en 2005 par Claude Ménétrey de miser sur le pressage des pommes n’a pas été facile, car cela exigeait de lourds investissements. Mais le succès dépassa ses espérances. De 50 000 litres de jus de pomme la première année, la production atteint 300 000 litres aujourd’hui s’il veut répondre à la demande. Le gel de l’année dernière ayant malheureusement anéanti une bonne partie de ses vergers, Claude Ménétrey a trouvé le moyen de contenter ses clients, non seulement ceux qui viennent s’approvisionner directement chez lui, mais aussi les restaurants, distributeurs et points de vente qui lui font confiance toute l’année. En plus de son jus de pommes et de son cidre fermenté selon la méthode traditionnelle, ainsi que du vin doux élaboré selon une recette venant du Canada, où on l’appelle le vin des glaces, Claude Ménétrey propose aussi ses propres fruits à manger à la main et ses poires qui sont également très prisées, mais il lui en manque cruellement.
La recette de son succès est de bien doser les différentes sortes de pommes qui entrent dans la composition de son breuvage. « Tout notre secret réside dans les mélanges de variétés », explique ce passionné de montagne et de moto. Le label GRTA (Genève région terre avenir) constitue un gage de qualité, même si le prix de ces produits labellisés est un peu plus élevé que ce que l’on trouve dans la grande distribution. Mais les consommateurs apprécient ses produits qu’il propose en cubitainers de différentes contenances et aussi en petites bouteilles. Son combat vise surtout à mieux rémunérer son travail et celui des arboriculteurs qui lui livrent leurs fruits et à ne plus dépendre du bon vouloir des grandes cidreries. Il a également le projet de proposer du cidre en fûts.
Tout ce travail demande pourtant un engagement sur la durée. « On presse de septembre à décembre, mais le reste de l’année, on ne reste pas inactif », souligne Claude Ménétrey. De décembre à mars, c’est l’époque de la taille, et en juin et juillet, celle de l’éclaircissage. « Les gens nous demandent pourquoi on laisse perdre des fruits, alors que l’on en manque. Mais si on ne le fait pas, on voit apparaître un phénomène d’alternance où l’on n’a presque plus de fruits après une année d’abondance », explique-t-il.
Bed & Breakfast Les Murailles : le charme de la campagne à deux pas de la ville
Néerlandaise d’origine, Line Müller a hérité avec son mari d’une charmante maison située dans le hameau des Murailles. Leurs enfants ayant quitté le nid familial pour mener leur vie d’étudiant dans le canton de Vaud, Line et son mari ont décidé de transformer cette grande maison en un havre de paix pour y accueillir des hôtes à l’écart de la fébrilité de la vie citadine. L’idée maîtresse de ce projet a été de préserver l’aménagement et la décoration d’origine de cette ancienne ferme. «Tout le choix de la décoration a été réalisé par ma belle-mère, qui avait beaucoup de goût et avait suivi une formation aux Beaux-arts», explique l’actuelle maîtresse des lieux.
Pour profiter de cet endroit hors du commun, elle ne cherche pas à attirer des flots de touristes, mais plutôt à offrir un toit à des gens dont elle pourrait se faire des amis. Elle reconnaît bien volontiers que les lieux ne sont pas prédestinés comme base pour visiter Genève, mais invitent plutôt à des promenades et excursions dans la nature alentour ou peuvent servir de toit à des personnes qui travaillent épisodiquement dans les manèges du village, suivent des stages ou sont engagés pour des missions dans la région et veulent profiter de la quiétude du hameau.
La maison s’anime un peu quand des hôtes débarquent pour participer à un mariage ou un baptême qui se déroule dans la région, attirés eux aussi par la promotion qui leur est faite par le réseau Bed and Breakfast Switzerland et son site Internet auquel ce charmant site est affilié.
Les quatre chambres proposées aux hôtes sont décorées avec beaucoup de goût, la cuisine et la salle à manger sont charmantes, la véranda est adorable et la terrasse très agréable. Avec sa mare, ses massifs de fleurs et ses arbustes, le jardin accentue encore le caractère bucolique de l’endroit. Son calme attire de nombreux oiseaux qui apprécient eux aussi la tranquillité des lieux.
La ferblanterie de Siebenthal, au service du confort quotidien des habitants
Créée en 1935 par le grand-père de Serge de Siebenthal et l’un de ses copains d’apprentissage, l’entreprise de ferblanterie éponyme est située actuellement dans la partie meynite de la zone industrielle de La Pallanterie, où elle fait vivre trois employés. Sa clientèle est constituée à 80% de particuliers qui ont besoin d’être dépannés ou que l’on améliore leur confort quotidien. Le solde des mandats provient des régies immobilières et des entreprises institutionnelles. Ses interventions concernent à 95% des travaux sanitaires et à 5% des ouvrages de ferblanterie. «J’aime bien maîtriser parfaitement tout ce que je fais», indique Serge de Siebenthal, qui a repris l’entreprise des mains de son père René en 1989. Son travail, varié, va de la construction et de la réparation de canalisations du réseau d’alimentation en eau le long des routes à la pose de robinets et pommeaux de douche dans les salles de bains. «Dans la rénovation, cela nécessite d’être innovant dans les solutions apportées aux clients», apprécie-t-il.
Serge de Siebenthal reconnaît que son activité a beaucoup évolué au cours de ces dernières années, avec le passage aux matériaux synthétiques, et que la population désire des salles d’eau toujours plus spacieuses et agréables à vivre. Les exigences se sont accrues en termes de qualité de l’eau, ce qui rend le travail également plus complexe. «La salle de bains est devenue plus qu’une simple pièce fonctionnelle, les gens demandent un confort et des quantités d’eau accrus, ce qui a des répercussions aussi bien sur l’amenée d’eau que pour son évacuation», précise-t-il. Son principal défi est, quelle que soit l’importance de ses interventions, de ne pas laisser un chantier en plan en fin de journée de sorte que les occupants du lieu puissent se doucher en rentrant du travail.
Dans ce métier, la formation continue est indispensable pour suivre les progrès en matière de normes, de matériaux et de produits. Le travail ne manque pas dans sa profession, à sa plus grande satisfaction: «Le volume de travail est relativement satisfaisant pour 2018 dans notre métier», se plait-il à relever. «Nous sommes à l’abri du chômage dans un métier d’avenir.»
Le club des Aînés, une lutte constante pour la cohésion intergénérationnelle
Fort de ses 164 membres, le club des aînés de Meinier a été créé le 21 mai 2008. Il fête donc ses dix ans d’existence cette année. Il regroupe des habitants de longue date de la commune, même si quelques fidèles ont déménagé depuis. La commune lui a mis à disposition un local situé au centre du village, où un complexe intergénérationnel a été inauguré en 2012 sur l’ancien emplacement des terrains de sport. On y trouve aussi une crèche, une ludothèque, un restaurant, une salle de gymnastique et de l’habitat mixte destiné en priorité aux habitants de la commune.
Les membres du club des aînés – en grande partie des aînées – se réunissent une fois par semaine pour s’adonner à des jeux de société et au tricot et pour passer des moments de détente et de discussion autour d’une tasse de thé. Des marches – suivies d’un repas – sont organisées une fois par mois pour se dégourdir les jambes dans la région, tout comme un petit déjeuner pris en commun. A cela s’ajoutent des projections de films et des conférences organisées à la salle communale. Le local est doté d’une cuisine entièrement équipée où les aînés invitent les enfants du parascolaire qui se réunissent quant à eux dans un local attenant. Deux voyages sont également mis sur pied chaque année.
«L’ambiance est agréable et décontractée. Plusieurs membres ont fait connaissance grâce au club et prolongent leur rencontre hebdomadaire par des activités informelles à plusieurs en dehors du local», relève Jean-Claude Gremion, président du club qu’il a créé en 2008. Après dix ans de travail bénévole à ce poste, il a pourtant décidé de passer la main lors de la prochaine assemblée générale du club. Ne reste plus qu’à lui trouver un successeur.
Photos de Magali Girardin