L’initiative sur les loyers est contre-productive

30 juin 2025
5 vues
4 minutes de lecture

La Chambre genevoise immobilière (CGI) s’oppose fermement à l’initiative populaire portée par l’Association suisse des locataires et présentée le 14 mai 2025. Selon nous, ce texte méconnaît les véritables causes de la hausse des loyers et risque d’aggraver la pénurie de logements. Une réglementation excessive freine les investissements, dégrade la qualité du parc immobilier et limite la mobilité résidentielle.

Une étude contestée

L’Association suisse des locataires fonde ses arguments sur une étude qu’elle a elle-même commandée, concluant que les locataires paient trop cher. Mais cette étude est critiquée depuis longtemps, y compris par le Conseil fédéral, pour sa méthodologie jugée partiale et sa lecture unilatérale du marché. Elle ne tient compte ni du droit du bail en vigueur, ni de la réalité du marché immobilier.

Les chiffres de l’Office fédéral de la statistique indiquent qu’en Suisse, le loyer moyen s’élève à 1’451 francs par mois. Depuis 2000, les ménages consacrent en moyenne 14% à 18% de leur revenu brut à leur loyer, ce qui est très raisonnable. Les locataires de longue date bénéficient de loyers modérés, la hausse des prix touchant principalement les nouveaux baux. Les augmentations de loyer s’expliquent souvent par des transformations, des rénovations, et des améliorations énergétiques. Par ailleurs, la croissance économique modérée et l’immigration qui y est liée alimentent la demande. Il faudrait construire des logements en plus grand nombre pour éviter la situation de pénurie actuelle.

C’est en améliorant l’offre que le coût du logement pourra durablement baisser.

Des mesures jugées inefficaces

La protection des locataires en Suisse figure parmi les plus strictes d’Europe. Toute personne suspectant un loyer abusif peut saisir l’autorité de conciliation à la conclusion du bail. Les hausses de loyer en cours de contrat doivent déjà être justifiées. L’instauration d’un contrôle généralisé des loyers, comme le propose l’initiative, remplacerait ce système éprouvé par une « machinerie kafkaïenne » de contrôles.

Rien ne prouve que le contrôle étatique des loyers est plus efficace que le système actuel. Un contrôle basé uniquement sur le rendement serait difficile à appliquer, notamment pour les bâtiments anciens, dont les données d’achat et la structure des coûts sont difficiles à reconstituer. Un contrôle généralisé impliquerait de vérifier les loyers de quelque 2,4 millions de ménages, générant une charge administrative sans précédent pour un résultat très aléatoire.

Miser sur la construction pour faire baisser les loyers

Les réglementations et interventions de l’État ne créent pas de logements supplémentaires. Pour faire baisser les loyers, il faut construire plus et ne pas multiplier les interdictions et les contrôles. Afin d’accélérer la création de nouveaux logements, il est indispensable de mettre en place des règles de construction plus souples, et des procédures d’autorisation simplifiées tout en réduisant la bureaucratie.

L’initiative sur les loyers fait fausse route : au lieu de remplacer des mécanismes éprouvés de protection contre les abus par un appareil de régulation tentaculaire, il faut miser sur plus de flexibilité, de rapidité et de constructions. C’est en améliorant l’offre que le coût du logement pourra durablement baisser, au bénéfice des locataires comme des futurs propriétaires.

« »

Vous aimerez aussi :

Édito

Editorial - Juin 2025

Dans une société où devenir propriétaire relève de plus en plus du parcours du combattant – foncier rare, prix en hausse, réglementation toujours plus dense – il est essentiel de rappeler que la propriété est un droit garanti par la Constitution fédérale. Ce droit est pourtant mis sous pression. La votation du 18 mai dernier, qui voulait imposer l’installation de panneaux photovoltaïques à tous les propriétaires, et la révision de la loi sur l’énergie en 2023, qui impose une réduction rapide de l’indice de déperdition de chaleur (IDC à 450 MJ/m²/an), en témoignent.
Diane Barbier-Mueller
2 minutes de lecture