Votation du 18 mai – oui au contre-projet sur les panneaux solaires

15 avril 2025
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Le 18 mai 2025, les citoyens genevois seront appelés aux urnes pour se prononcer sur deux textes visant à accélérer la transition vers l’énergie solaire dans le canton : l’initiative populaire « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève » (IN 191) et son contre-projet « Dynamisons la production d’énergies
renouvelables ». Ces deux propositions, bien qu’elles partagent un objectif commun, présentent des approches distinctes avec des résultats radicalement différents en termes de faisabilité, d’esthétisme et d’efficacité.

L’initiative 191 : une approche radicale

En 2022, les Vert’libéraux ont lancé une initiative proposant une transition rapide et généralisée vers l’énergie solaire.
L’IN prévoit notamment :
– l’obligation généralisée d’installer des panneaux solaires photovoltaïques sur l’ensemble des surfaces des constructions existantes ou futures, y compris les façades et balcons ;
– l’application minimale du droit fédéral en matière de protection du patrimoine ;
– la garantie théorique, par le Canton, du prix de vente de l’électricité produite pendant toute la durée de vie des installations.

Cette approche ambitieuse mais radicale a rencontré une série d’obstacles tant techniques que pratiques qui ont suscité d’emblée de fortes réserves.

Contraintes et obligations

L’initiative impose l’installation généralisée de panneaux photovoltaïques sur toutes les constructions existantes et neuves. Toutes les surfaces adaptées sont concernées : toitures mais aussi façades et balcons. Le texte contraint également les propriétaires à réaliser ces travaux avant le 31 décembre 2034. Il s’agit en somme d’une obligation légale générale d’installer un seul type de panneaux solaires dans tout le canton de Genève, une méthode pas forcément pertinente d’un point de vue énergétique et économique selon le Conseil d’État.

Efficacité et faisabilité

L’obligation généralisée d’installer des panneaux solaires photovoltaïques sur toutes les surfaces disponibles ne tient pas compte de l’efficacité réelle des installations. Certaines surfaces, comme les façades nord ou les balcons ombragés, ne sont pas optimales pour la production d’énergie solaire. De plus, cette approche ne distingue pas les différents types de panneaux solaires (photovoltaïques et thermiques) et leurs utilisations spécifiques. L’initiative ignore par ailleurs les technologies propres visant par exemple à générer des bulles de chaleur dans le sol à l’aide de panneaux solaires thermiques puis à récupérer cette chaleur en hiver et à l’optimiser à l’aide de pompes à chaleur.

Impact esthétique

L’application systématique de panneaux solaires sur tous les bâtiments, y compris les façades, pourrait avoir un impact esthétique considérable sur le paysage urbain et rural du canton. On estime que jusqu’à 80% des façades, balcons et toitures pourraient être recouverts de panneaux noirs, ce qui soulève de vives inquiétudes quant à l’aspect visuel du canton.

Protection du patrimoine

L’initiative propose de s’en tenir à la protection minimaliste du patrimoine définie par le droit fédéral. Cette approche ne prend pas en compte les spécificités locales et la sensibilité patrimoniale propre à Genève.

Garantie du prix de rachat

La garantie du prix de rachat de l’électricité pendant toute la durée de vie des installations est jugée peu réaliste et difficilement applicable. Les fluctuations du marché de l’énergie sur une période de 20 ans rendent cette garantie risquée pour le canton. Rappelons également que c’est en application du droit fédéral, que le Conseil fédéral fixe le prix maximal de rachat de l’électricité pour éviter des distorsions de concurrence. Ce sont les raisons pour lesquelles le Conseil d’État a indiqué que l’initiative n’était pas praticable.

Le contre-projet : une alternative pragmatique et équilibrée

Bien que souscrivant à la nécessité d’accélérer la transition énergétique, le Conseil d’État a exprimé plusieurs objections au dispositif proposé par les initiants. Afin de tenir compte des réalités techniques, esthétiques et patrimoniales cantonales, il a demandé au Grand Conseil d’élaborer un contre-projet à l’IN 191.
Fruit d’un travail approfondi et d’un consensus politique, il offre une alternative permettant d’atteindre des objectifs très ambitieux en matière de production solaire, tout en respectant les spécificités du territoire genevois ainsi que ses contraintes techniques et économiques.

L’application systématique de panneaux solaires sur tous les bâtiments, y compris les façades, pourrait avoir un impact esthétique considérable sur le paysage urbain et rural du canton.

Ciblage des surfaces les plus productives

Le contre-projet se concentre sur les surfaces les plus productives, notamment :

  • les grands consommateurs d’électricité (plus de 0,2 GWh par an, essentiellement en zone industrielle) qui devront s’équiper d’ici 2030. L’électricité produite sera prioritairement destinée à leur autoconsommation, favorisant ainsi leur indépendance énergétique ;
  • les toitures des immeubles neufs ;
  • les immeubles en rénovation ;
  • les toitures en rénovation.

Cette approche ciblée permet de maximiser l’efficacité des installations tout en limitant l’impact visuel. À l’heure où la pénurie de main-d’oeuvre, de panneaux solaires photovoltaïques et d’ingénieurs susceptibles de suivre ces travaux est avérée, il est essentiel de pouvoir réaliser des installations d’une taille relativement importante et générant une quantité d’électricité significative plutôt que de multiplier les projets de petite taille qui sont, par définition, consommateurs de ressources à outrance.

Selon nous, le contre-projet sera, sous cet angle, bien plus à même d’atteindre les objectifs d’une forte augmentation de l’énergie photovoltaïque produite à Genève.

Protection du patrimoine nuancée

Le contre-projet propose une approche plus fine de la protection du patrimoine, en définissant clairement les cas où une autorisation de construire est nécessaire pour l’installation de panneaux solaires. Cette méthode permet de préserver le patrimoine tout en facilitant le
développement du solaire.

Simplification des procédures

Le contre-projet prévoit que 89% des poses de panneaux solaires ne nécessiteront plus d’autorisation de construire si elles répondent à des conditions bien définies. Cette mesure vise à faciliter et à accélérer le déploiement des installations solaires.

Financement et aides de l’État

En lieu et place d’une garantie de rachat de l’électricité, le contre-projet propose des mesures de soutien plus réalistes :

  • subventions ;
  • dégrèvements fiscaux ;
  • prêts ;
  • cautionnements.

Le Canton pourra notamment octroyer une caution solidaire sur l’intégralité du financement des installations solaires pour les biens appartenant à la fortune privée des propriétaires.

Raccordement technique

Le contre-projet aborde la question technique du raccordement des installations photovoltaïques au réseau électrique. Il prévoit que les Services Industriels de Genève (SIG) seront responsables du branchement des lignes, avec un partage équitable des coûts entre les SIG et les propriétaires.

Le 18 mai, les Genevois devront trancher entre deux questions :

Faut-il privilégier une approche coercitive, qui impose des obligations à tous, ou faut-il opter pour une approche plus flexible et incitative qui équilibre les impératifs énergétiques, économiques et patrimoniaux ?

Le Conseil d’État, l’intégralité du Grand Conseil (tous partis confondus), les associations économiques sont tous convaincus par le contre-projet, estimant que les incitations sont plus efficaces que la coercition dans la mise en oeuvre d’une transition énergétique rapide. Tandis que l’initiative défend une solution radicale, le contre-projet propose une approche plus nuancée et pragmatique, en se concentrant sur les secteurs et les infrastructures où l’impact sera le plus significatif. Au final, il permet de concilier les objectifs de transition énergétique avec la préservation de l’esthétique urbaine et du patrimoine, tout en garantissant une mise en oeuvre des mesures plus efficace et plus rapide.

Pour toutes ces raisons, le 18 mai, votons :

NON à l’IN 191 « Pour une transition rapide vers le solaire à Genève », une initiative trop radicale, impraticable et esthétiquement discutable.
OUI au contre-projet « Dynamisons la production d’énergies renouvelables » qui se veut flexible, adapté et incitatif.
À la question subsidiaire : CONTRE-PROJET.

 

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