Jurisprudences récentes – Mai 2018

8 mai 2018
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Calcul du délai comminatoire en cas de non-paiement du loyer – Airbnb et autres plateformes de location : limitation à 60 jours par an

Calcul du délai comminatoire en cas de non-paiement du loyer

Dans le cas traité par la Cour de justice genevoise, dans un arrêt du 27 novembre 2017, (ACJC/1529/2017), un contrat de bail est conclu entre un bailleur et un locataire portant sur une villa de 6 pièces à Genève. Le loyer a été fixé à CHF 4800.- par mois, charges non comprises. Suite à un non-paiement du loyer, la bailleresse a mis en demeure, par courrier du 23 mars 2016, le locataire de s’acquitter d’un montant total de CHF 9640.-, correspondant aux loyers des mois de février et mars 2016 ainsi qu’à CHF 40.- de frais de rappel.

La bailleresse a imparti au locataire un délai de paiement de 30 jours et l’a informé qu’à défaut de paiement intégral, son contrat de bail serait résilié pour défaut de paiement du loyer. Ce courrier recommandé n’a pas été réclamé dans le délai de garde postal. Aucun paiement n’étant intervenu, la bailleresse a résilié le contrat de bail le 28 avril 2016 pour le 30 juin 2016. Ultérieurement, ce congé a été déclaré inefficace, suite à une procédure en contestation de congé, puisque prématuré dans la mesure où il a atteint le locataire le 30 avril 2016, soit le dernier jour du délai comminatoire.Le 30 avril 2016, le locataire a payé CHF 9640.- au moyen du bulletin de versement qui lui a été remis avec l’envoi de la mise en demeure du 23 mars 2016. Le compte bancaire de la bailleresse a été crédité le 3 mai 2016.

Avant de connaître l’issue de la procédure portant sur le congé notifié le 28 avril 2016, la bailleresse a notifié un nouvel avis de résiliation du bail au locataire le 7 septembre 2016 afin de « réserver les droits du bailleur au cas où la résiliation envoyée le 28 avril 2016 devait être annulée par le Tribunal ». Ce congé a également été contesté par le locataire. Le Tribunal des baux et loyers a validé ce congé en considérant que le loyer était une dette portable et qu’il appartenait au locataire de prendre ses dispositions pour que l’arriéré réclamé arrive sur le compte du bailleur le dernier jour du délai comminatoire au plus tard.

Dans le cas d’espèce, le compte de la bailleresse ayant été crédité le 3 mai 2016, soit après l’échéance du délai comminatoire, les conditions d’une résiliation pour défaut de paiement étaient réalisées. Statuant sur appel, la Cour de justice a rappelé la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 4A_172/2005), selon laquelle un paiement effectué le dernier jour du délai comminatoire auprès de la poste, à l’intention de la bailleresse, est intervenu en temps utile. Lorsqu’un bulletin de versement (avec un compte de chèque postal) est annexé à une mise en demeure, le locataire peut partir du principe qu’il suffit, pour que le délai de paiement soit respecté, qu’il effectue le paiement dans un bureau de poste avant l’échéance, le créancier assumant le risque du retard qui pourrait résulter de ce mode de paiement.

Dans le cas d’espèce, à défaut d’indication contraire des parties et dans la mesure où un bulletin de versement a été remis au locataire, la poste a été désignée comme lieu de paiement valable pour le loyer et le locataire pouvait payer la somme due jusqu’au dernier jour du délai comminatoire. La date de crédit du compte de la bailleresse est sans pertinence. Le paiement effectué le 30 avril 2016 ayant été effectué en temps utile, le congé du 7 septembre 2016 a été déclaré inefficace.

Ainsi avant de procéder à une résiliation, il convient de vérifier à quel moment le locataire a procédé, le cas échéant, au paiement et par quel moyen.

Airbnb et autres plateformes de location : limitation à 60 jours par an

En date du 7 mars 2018, le Conseil d’État a modifié le règlement d’application de la loi sur les démolitions, transfor­mations et rénovations de maisons d’habitation (RDTR) en y ajoutant un article 4A, qui prévoit que «la location de tout ou partie de logements au travers de plates-formes de location est considérée comme un changement d’affectation au sens de la loi si elle excède 60 jours par an.»

Cette modification est entrée en vigueur le 1er avril 2018.

Concrètement, cela signifie qu’il est désormais interdit de louer son appartement ou une chambre plus de 60 jours par an via des plates-formes de location destinées à des touristes ou à des personnes de passage.

Si le délai de soixante jours est dépassé, il sera considéré que le logement tombe sous le coup d’un changement d’affec­tation, qui est prohibé, et le contrevenant sera sanctionné. L’amende, d’un montant minimum de CHF 100.-, peut aller jusqu’à CHF 150 000.-.

Nous saluons la volonté du Conseil d’État d’encadrer ce type d’activité d’hébergement compte tenu des nombreuses questions qui se posent, notamment le respect des condi­tions légales de la sous-location, le possible aggravement de la pénurie de logements et les nuisances que ces sous-locations temporaires peuvent causer aux autres habitants de l’immeuble.

Nous rappelons que, selon le droit du bail, le locataire est tenu d’obtenir le consentement de son bailleur avant de mettre son appartement à disposition d’un tiers, ce qui im­plique la communication des conditions de la sous-location. A défaut, le locataire s’expose à la résiliation anticipée de son contrat de bail à loyer, après un avertissement demeuré sans suite, et au remboursement des montants perçus de manière illégitime. Dans ce cadre, nous aurions souhaité que ces conditions soient formellement rappelées aux locataires par les autorités.

Bien entendu, cette limitation s’applique aussi aux proprié­taires qui entendent mettre leur bien immobilier en location par ce biais.
Enfin, les revenus de la location doivent être déclarés au fisc et la taxe de séjour devra être acquittée par les visiteurs.

Texte de Anne Hiltpold

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